La phrase qui a bouleversé sa vie

Liégeois de pure souche, il est ce colosse athlète unijambiste croisé tantôt sur la piste d'athlétisme de la ville aux millionnaires, tantôt sur le Ravel non loin de Belle-Île en Cité ardente. Ce personnage attachant dont la modestie n'a d'égal que sa légendaire amabilité. Pourtant capable de réaliser des prouesses quelque soit l'épreuve sur laquelle il s'aligne, il préférera infiniment parler des autres que de se mettre lui-même en avant. Il est de ceux qui ne font pas de bruit alors qu'il est devenu, au fil des années, un exemple de bravoure, de force et d'optimisme auprès des nombreux sportifs, handicapés ou non. Son nom ? Pierre Denis. Prenez un siège et asseyez-vous car aujourd'hui, fait rarissime, il a accepté de se livrer à info-athle, de se livrer à VOUS chers lecteurs. Aujourd'hui, il va nous révéler sa propre histoire lors d'une interview à coeur ouvert.

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MAI 1993, TOUT BASCULE...

Si Pierre Denis se retrouve unijambiste aujourd'hui, ce n'est pas le fruit d'un quelconque problème lié à sa naissance. Grand amateur de sport en tout genre dont le tennis de table et le cyclisme, c'est en vivant sa passion que le cauchemar eut surgi de nulle part. Il faut remonter à mai de l'an 1993. Alors qu'il disputait un match amical avec son équipe de football qui évoluait en première provinciale, Pierre Denis se présenta devant le but et subissait une intervention rugueuse du portier adverse. Son corps s'éleva par dessus le gardien tandis que sa jambe fut restée coincée sous celui-ci et se brisa...

« J'ai eu une double fracture et j'ai donc été emmené à l’hôpital de suite pour subir une opération. La fracture a été réduite mais l’aspect vasculaire a été négligé et ça a dégénéré. Malgré mes plaintes répétées, on m’a ignoré pendant 2 jours au bout desquels j’ai supplié mon médecin traitant de m’aider à changer d’hôpital. Ce fut fait mais c’est comme si j’avais gardé un garrot 48h, beaucoup de tissus étaient nécrosés, j’avais perdu deux artères sur trois et une partie du pied était déjà noire. On s’est battu dans cet autre hôpital pendant des mois avec des dizaines de passages au bloc » nous confiait Pierre.

DÉCEMBRE 1993, UNE NOUVELLE VIE DÉBUTE...

Les mois ont défilé et les tentatives de soigner sa jambe se sont enchaînées en vain. Une infection au niveau de l'os a fait son apparition et le temps se faisait de plus en plus pressant. Il était alors venu le moment de faire un choix qui allait changer drastiquement sa vie et ses habitudes.

« J’ai demandé qu’on coupe au plus vite pour ne pas perdre le genou. C’était l’inconnue, vais-je le garder ? Ça dépendra du niveau de l’infection.  Le 29 décembre on m’amputait et au réveil, fou de joie, je voyais que j’avais conservé le genou. Quel paradoxe... On m’enlève un pied et je fais la fête car j’ai un genou et pour la première fois depuis des mois je n’ai plus mal. J’avais à peine 26 ans et je démarrai une seconde vie… » poursuit-il.

LA PHRASE QUI A BOULEVERSÉ SA VIE

Dés qu'il a pu remarcher, Pierre s'est dirigé vers l'hôpital bruxellois et ce médecin qui lui avait prodigué les bons soins avec une seule et unique question en tête : Quels sports pouvait-il encore pratiquer ? Et il ne s'attendait certainement pas à cette réponse. En effet, le médecin lui suggéra de faire du cyclisme ou de la natation et d'oublier la course à pied. Une solution que Pierre se refusa d'accepter. « aaah je ne pourrai pas courir... et bien c’est ce qu’on va voir! » lui répondit-il. Une situation qui nous rappelle 1999 lorsque l'on disait à Ronaldo qu'il ne pourrait plus jouer au foot à un haut niveau. Plus on lui disait cela, plus cela le motivait à revenir plus fort. Ce jour là, nous avons vu l'éclosion d'Il Fenomeno Pierre Denis.

Il a alors rencontré Didier Simons qui l'a initié à la course à pied. À l'époque, pas de lame, il était équipé d'un pied basique bricolé avec les moyens du bord et s'entraînait parfois en cachette par honte de ce qu'il était.

« Quand je fus prêt, Didier me fit connaitre le RFC Liège Athlétisme où j’ai connu des années magnifiques. Humainement un super accueil par les athlètes, les entraineurs, les dirigeants et sportivement avec des titres et des participations à d'incroyables compétitions. Myriam Smette, Jean-Marie Branle, Jean Boudart et Abdel Boukriniaa m’ont tout appris au fil des ans et de mon évolution du sprint vers le fond. En 2007, j’ai déménagé et me suis éloigné de Naimette..et j’ai laissé tomber pendant 2-3 ans jusqu’à ce que je rencontre un groupe de joggeurs dans les bois de Seraing. L’AC Neupré me redonnait envie de courir. Lors d’une sortie avec ce groupe, j’ai croisé la route de la sœur de Luc Huberty qui me parla de son frère. Je l’ai contacté, on s’est vu sur la piste de Huy. Je remettais les pieds sur une piste pour la première fois depuis des années. J’allais ainsi reprendre les séances de piste avec l’AC Huy en alternance avec le hors stade. Si je n’ai plus fait pour autant de compétition sur piste, j’ai multiplié les courses sur route et au passage découvert le trail et le cross. »

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ET AUJOURD'HUI ?

Son bilan à l'heure actuelle est tout simplement prodigieux puisque Pierre est détenteur de 6 records de Belgique sur 60m, 100m, 200m, 1500m, 3000m et marathon. Il a également plusieurs titres nationaux mais fut aussi une fois champion d’Europe sur 200m et vice champion d’Europe sur 400m. Il a reçu le mérite sportif à Awans, Liège et Huy pour ses résultats. Officiellement, il était le premier belge unijambiste à avoir bouclé la distance du marathon. C'était à Valence en 2017 et ce chrono de 4h34 malgré de nombreuses complications durant sa prépa.

Pour 2021, il sait qu'il devra faire un choix entre les compétitions sur piste, sur route et les trails s'il veut préserver ses genoux. A-t-il un objectif en tête ? La réponse est non et il le regrette en quelques sortes. Il lui manque un sparring-partner, une personne capable de le motiver et de lui permettre de se sentir moins seul. Car oui, il adore l'aspect social et culturel de la course à pied. Partager, voyager, faire des rencontres... Il adore ça! Alors en attendant de trouver cette personne, il va continuer à courir trois fois par semaine afin d'être prêt.

Pierre Denis est une force de la nature, il est plus qu'un athlète, il est un guide. Il est tout simplement la preuve incontestable qu'avec de la volonté tout est possible.

 

Date de dernière mise à jour : 12/11/2020

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Commentaires

  • Freddy
    • 1. Freddy Le 07/11/2020
    La team Kaio est une vrais famille et on a toujours rêvé d'adopter un gros bébé...

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